Le Pr. Carlos Moreno est à Hanoi ce mercredi, où il participe au 37ème congrès de l’INTA. À découvrir : le texte de sa présentation sur l’apport du design de services et des plateformes à la ville et son reportage photos dans les rues de la ville.
Caractéristiques de la ville
La ville est un lieu d’agrégation d’être humains dont les besoins vitaux, d’épanouissement et de développement se croisent de multiples manières. Elle est un système complexe, au sens étymologique du terme, du latin complexus, « entrelacé ».
Les individus, comme les systèmes qui composent une ville, n’existent qu’en lien les uns avec les autres. Au niveau de la métropole, cette complexité est encore renforcée du fait du changement d’échelle.
Dans la ville il y a ainsi une multiplicité de besoins, d’usages, de services, de flux : l’alimentation, l’habitat, l’environnement, l’éducation, la culture, les transports, la santé, la sécurité, l’énergie, les déchets, la communication etc.
Chaque ville évolue dans son propre contexte, à son rythme, qui varie également. D’une ville à une autre les contextes sont différents, de nature culturelle, géopolitique, historique, religieux… et ils façonnent ainsi les nombreuses caractéristiques de la ville et de ses habitants.
La ville doit offrir toute une gamme de services pour mettre en cohérence les habitants et leur environnement, pour mieux vivre, mieux se loger, se déplacer, se nourrir etc.
Des enjeux inédits
Or la planète a dépassé les 7 milliards d’habitants et pour la première fois depuis l’histoire de l’humanité plus de 50% d’entre eux habitent en ville, atteignant en Europe même 77%. En 2030 sur 8,3 milliards d’humains, près de 5 milliards seront des urbains.
Des défis jamais rencontrés auparavant se posent ainsi aujourd’hui à l’ensemble de l’humanité, concernant sa survie elle-même. De nouveaux besoins de vie, alimentaires, de santé, climatiques, de mobilité, etc… s’imposent et demandent des réponses qui doivent se projeter face à ces environnements changeants, avec une nature menacée qui nous confronte elle aussi à des situations inédites.
Dans ma vision, une ville est aussi un système vivant, qui se développe dans le temps. Comme tous les organismes vivants, elle obéit donc à deux tendances, qui sont l’essence même de la complexité : d’une part, elle doit satisfaire ses besoins pour croître. Toute ville a pour fonction de satisfaire les besoins vitaux de ses habitants et leur quête de bien-être. D’autre part, elle est soumise à un certain nombre d’aléas qui la rende fragile : tempêtes, pannes, incendies, attentats, épidémies etc. La ville doit donc être donc à la hauteur de besoins et exigences de ses habitants et elle doit être aussi résiliente, c’est-à-dire être capable de surmonter ces aléas.
Comprendre la fragilité de la ville, penser la ville comme un lieu de vie hautement sensible, se projeter dans sa fragilité, rendre la ville plus légère, la rendre plus accessible, la faire devenir résiliente face aux aléas sont des enjeux essentiels pour les années à venir.
Révolution numérique : quels apports ?
La révolution numérique actuelle se caractérise principalement, selon moi, par la présence diffuse du numérique au cœur de toutes les activités humaines, par ce phénomène de maillage sans limites que l’on voit s’opérer et qui nous amène à dire que le numérique est partout. Cette transversalité en fait une source majeure d’opportunités de création de valeur dans tous les secteurs d’activité, pratiquement sans exception.
Pour aller au bout de cette révolution et des profondes transformations qu’elle implique, il est cependant nécessaire de réinventer le numérique, en le pensant non plus à partir des objets technologiques, mais à partir des usages et services nouveaux qu’ils rendent possibles. Il faut aujourd’hui changer de paradigme pour donner toute sa force à la notion de design des services.
Une véritable révolution culturelle est donc indispensable, qui placerait la compréhension des systèmes interdépendants par leurs interactions au cœur de notre action, nous permettant ainsi d’inventer et de réinventer, en amont, des usages et services qui transforment la vie et créent de la valeur, mais aussi des valeurs – au sens économique et au sens éthique du terme.
Les plateformes de services, un puissant levier de transformation.
Les plateformes de services sont des systèmes qui permettent d’agréger, d’enrichir, de récréer, de contextualiser des informations, mais c’est surtout par leur biais que les usages et les fonctionnalités peuvent être repensés et incarnés. Véritables espaces d’agrégation et de rencontres dans lesquels convergent les mondes physique, numérique et social, les plateformes sont ainsi des lieux où l’on appréhende autrement les usages.
A travers les plateformes dédiées à la mobilité en ville par exemple, la voiture n’est plus pensée comme un objet propre mais comme une fonctionnalité, parmi d’autres, pour se déplacer. Les plateformes font ainsi naître une culture de l’aller-retour indispensable entre le monde physique et le monde physique par le biais du monde numérique, hybridation fertile qui fait naître de nouveaux usages et fonctionnalités.
Quelles conséquences sur les villes ?
Nous sommes avec l’utilisation de la technologie au service des usages citoyens au début d’une tendance profonde, qui va créer des services et des usages radicalement nouveaux, mais aussi bouleverser la façon dont les villes et les métropoles répondent aux besoins vitaux et de bien-être de leurs habitants et font face aux aléas qu’elles subissent.
Chacun pourra contribuer via les réseaux sociaux à l’élaboration des services publics et l’on verra sans doute émerger de nouvelles façons de vivre. Nous sommes également en train d’assister à une révolution des modes d’organisation : les systèmes hiérarchisés et verticalisés sont progressivement remis en question, car aujourd’hui avec la diffusion massive et horizontale des informations, chacun peut s’approprier les compétences et prendre les décisions.
Dans ma vision, il est crucial d’apporter à la ville et ses habitants une intelligence ambiante distribuée, pertinente, disponible et accessible à tout moment, à chaque instant et dans tout lieu, pour qu’elle soit auto-adaptative, auto-apprenante, robuste, auto-réparatrice,
Nos villes, environnements complexes, devront ainsi devenir des écosystèmes transverses, ouverts, évolutifs, adaptatifs permettant à l’homme de s’épanouir.
À quoi ressemblera la ville de demain ?
L’usage quotidien des nouvelles technologies, qui se banalisent partout dans le monde, est devenu incontournable dans l’adaptation de la ville et de ses habitants aux enjeux d’aujourd’hui et de demain. La ville devient interactive, communicante.
On voit déjà apparaître de nouvelles façons de se déplacer par exemple, qui répondent à nos besoins de consommer moins d’énergie : les systèmes d’information intelligents qui nous renseignent en temps réel pour favoriser le report modal vers les transports en commun, l’auto-partage, le co-voiturage etc.
Demain, on peut imaginer par exemple que la carte d’abonnement au système urbain de véhicules électriques servira aussi pour le vé’lib, les transports en commun, le cinéma, le retrait bancaire ou autre.
Des capteurs installés sur les véhicules permettront de créer de l’information en temps réel pour renseigner sur l’état du trafic, alimenter des bases de données pour calculer des temps moyens de parcours, etc.
De même dans le domaine de la santé, notamment en ce qui concerne la lutte contre la dépendance et le maintien de l’autonomie : il y aura sans doute la généralisation des réseaux sociaux dédiés aux aidants familiaux ou destinés à renforcer les liens de voisinage, de solutions pour désengorger les consultations médicales et de façon générale pour renforcer la prévention ou enrichir le quotidien.
On pourra aussi identifier plus facilement les zones de précarité sociale par exemple, en suivant leurs seuils de consommation énergétique ou leurs temps de transport, afin de leur prêter une plus grande attention.
Les défis énergétiques et l’émergence de la ville décarbonnée imposent de mettre le développement durable au cœur de la vie de la cité. La cité du futur, que nous bâtissons chaque jour, est guidée aussi par le besoin impératif de mutualiser et d’optimiser ses ressources.
Notre devoir est de mobiliser ainsi la communauté de tous les acteurs de la ville (décideurs, élus, académiques, chercheurs, industriels, citoyens…) pour réfléchir et partager nos visions, au travers le monde, de manière collaborative et transverse, afin d’anticiper ensemble les enjeux et solutions de demain.
Dès aujourd’hui, il nous faut construire des écosystèmes transdisciplinaires, en faisant dialoguer des ingénieurs, philosophes, urbanistes, sociologues, architectes, designers, industriels, etc.
Pr. Carlos Moreno
Profesor Carlos Moreno
Et reportage photo Hanoï Décembre 2013
La ciudad es un lugar de agregación de seres humanos en la cual la satisfacción de las necesidades vitales, del bien vivir y de desarrollo se cruzan de maneras múltiples. Es un sistema complejo, en el sentido etimológico de la palabra, del latino complexus, “entrelazado”.
Los individuos, como los sistemas que componen una ciudad, existen sólo ligados los unos con otros. Al nivel de una metrópolis, esta complejidad es todavía reforzada a causa del cambio de escala.
En la ciudad hay así una multiplicidad de necesidades, de usos, servicios, flujos: la alimentación, el hábitat, el medio ambiente, la educación, la cultura, los transportes, la salud, la seguridad, la energía, los residuos, la comunicación etc.
Cada ciudad evoluciona en su propio contexto, a su ritmo, que también varía. De un ciudad a otro los contextos son diferentes, de naturaleza cultural, geopolítica e histórica, religioso y dan forma así a las numerosas características de la ciudad y de sus habitantes.
La ciudad debe ofrecer toda una gama de servicios para poner en coherencia a los habitantes y su entorno para vivir mejor, mejor alojarse, desplazarse, alimentarse etc.
Pero el planeta sobrepasó los 7 mil millones de habitantes y por primera vez desde la historia de la humanidad más de 50 % de ellos viven en la ciudad, alcanzando en misma Europa el 77 %. En 2030 sobre 8,3 mil millones de humanos, cerca de 5 mil millones serán urbanos.
Los desafíos actuales nunca se han presentado con tanta gravedad hoy al conjunto de la humanidad, concerniendo a su misma supervivencia. Las nuevas necesidades de vida, productos alimentarios, de salud, climáticos, de movilidad, etc. se imponen y exigen respuestas que deben proyectarse frente a estos entornos cambiantes, con una naturaleza amenazada que también nos confronta con situaciones inéditas.
En mi visión, una ciudad es también un sistema vivo, que se desarrolla en el tiempo. Como todos los organismos vivos, obedece pues a dos tendencias que son la misma esencia de la complejidad: de una parte, debe satisfacer sus necesidades para desarrollarse. Toda ciudad tiene como función satisfacer las necesidades vitales de sus habitantes y su búsqueda de bienestar. Por otra parte, está sometida a un cierto número de azares que la hace frágil: tempestades, averías, incendios, atentados, epidemias etc. La ciudad debe pues ser pues a la altura de necesidades y exigencias de sus habitantes y debe también ser résiliente, es decir ser capaz de superar estos azares.
Comprender la fragilidad de la ciudad, pensar en la ciudad como un lugar de vida altamente sensible, proyectarse en su fragilidad, devolver la ciudad más ligera, devolverlo más accesible, hacerla résiliente frente a los azares son algunos de los desafíos esenciales para los años venideros.
La revolución digital actual principalmente se caracteriza, según mi, por la presencia difusa del digital en el corazón de todas las actividades humanas. Por este fenómeno de conexiones permanentes de todo tipo podemos decir que el digital esta por todas partes. Esta transversalidad ha credo oportunidades de creación de valor en todos los sectores de actividad, prácticamente sin excepción.
Para ir mas lejos es indispensable sin embargo reinventar nuestra percepción de lo digital para comprenderlo no a partir de los objetos tecnológicos que lo encarnan sino mas bien a partir de los usos y los servicios nuevos que lo hacen posibles de convertirse en una realidad cotidiana para cada uno.
Hay que hoy cambiar de paradigma para darle toda su fuerza a la noción de diseño de los servicios.
Una revolución cultural verdadera es pues indispensable, que colocaría la comprensión de los sistemas interdependientes por sus interacciones en el corazón de nuestra acción, permitiéndonos así inventar y reinventar los usos y servicios que transforman la vida y crean nuevas fuentes de valor en todos los sentidos del termino.
Las plataformas de servicios, son un incentivo poderoso de transformación. Las plataformas son en efecto unos sistemas que permiten agregar, enriquecer, recrear, contextualizar informaciones, pero es sobre todo por su capacidad de hacer que los usos y las funcionalidades pueden ser repensados y encarnados. Espacios verdaderos de agregación y de encuentros en los cuales converge el mundo físicos, digital y social, las plataformas son así unos lugares dónde se aprehende de otros modos los usos.
A través de las plataformas dedicadas a la movilidad en la ciudad por ejemplo, el coche no es pensado más como un objeto limpio sino como una funcionalidad, entre otros, para desplazarse. Las plataformas originan así una cultura de imbricación indispensable entre el mundo físico con el mundo digital numérico, dando luz a la hibridación fértil que origina nuevos usos y funcionalidades.
Qué consecuencias supone eso para las ciudades?
Con la utilización de la tecnología al servicio de los usos ciudadanos, entramos en la fase inicial de una tendencia profunda, que va a crear servicios y usos radicalmente nuevos, pero también va a transformar la respuesta de las ciudades y las metrópolis ante las necesidades vitales y de bienestar de sus habitantes y la forma de enfrentarse a los problemas que padecen.
A través de las redes sociales, cada cual podrá contribuir a la elaboración de servicios públicos, y es probable que surjan nuevas formas de vivir. También estamos asistiendo a una revolución en las formas de organización: poco a poco se van cuestionando los sistemas jerarquizados y verticalizados, porque en la actualidad con la difusión masiva y horizontal de la información, cada cual puede apropiarse de las competencias y tomar decisiones.
En mi visión, resulta crucial aportar a la ciudad y a sus habitantes una inteligencia ambiente distribuida, pertinente, disponible y accesible en todo momento, en cada instante y en cualquier lugar, para que resulte autoadaptativa, robusta, reparadora.
Desde mi óptica, nuestras ciudades, que son unos entornos complejos, deberán convertirse en ecosistemas transversales, abiertos, evolutivos, adaptativos y que permitan que el hombre se realice.
Los retos energéticos y la emergencia de la ciudad sin carbono exigen que el desarrollo sostenible pase a ocupar el centro de la vida ciudadana. La ciudad del futuro, que construimos día a día, también se guía por la imperativa necesidad de optimizar y poner en común sus recursos.
Así, el uso diario de las nuevas tecnologías, que se hacen triviales en cualquier parte del mundo, participan en la construcción de un nuevo paradigma de una ciudad interactiva, comunicante.
Ya vemos parecer de nuevos modos desplazarnos por ejemplo, que responden a nuestras necesidades de consumir menos energía: los sistemas inteligentes de información que nos informan en tiempo real para favorecer el desplazamiento modal hacia los transportes públicos, el uso compartido del coche etc.
Lo mismo en el sector de la salud, particularmente. Habrá sin duda una generalización de las redes sociales dedicadas a enfermos y sus familiares y próximos destinados a reforzar los lazos de vecindad, de soluciones para reforzar la prevención o enriquecer la vida cotidiana.
Podremos también identificar más fácilmente las zonas de precariedad social por ejemplo, siguiendo sus umbrales de consumo energético o sus tiempos de transporte, con el fin de prestarles una atención más grande. Los desafíos energéticos y la emergencia de la ciudad sin carbono se imponen de poner el desarrollo sostenible en el corazón de la vida de la ciudad. La ciudad del futuro, que edificamos cada día, es guiada también por la necesidad imperativa de mutualizar y de optimizar sus recursos.
Nuestro deber es movilizar así la comunidad de todos los actores de la ciudad (responsables, mandatarios electos, académicos, investigadores, industriales, ciudadanos) para reflexionar y compartir nuestras visiones cada uno en distintas partes del mundo, de manera colaborativa y transversa, con el fin de anticipar juntos los desafíos y las soluciones de mañana.
Es esencial construir ecosistemas trans-disciplinaires, haciendo dialogar en el mundo entero a ingenieros, filósofos, urbanistas, sociólogos, arquitectos, diseñadores, industriales …
El camino aún es largo, pero recorrerlo es esencial, muchos mas que el objetivo mismo.
Cada uno entonces manos a la obra y construyamos juntos desde hoy la ciudad de mañana, la ciudad viva… Live in a living City.
Hanoi 4 de diciembre 2013